Détenir des actions à long terme : un avantage pour les investisseurs malgré la volatilité associée
Après le recul important des 15 premiers jours du premier trimestre de 2016, le S&P 500 s’est raffermi pour terminer le trimestre tout près de sa valeur initiale. Cependant, lorsqu’on tient compte de la hausse du huard pour convertir la performance du S&P 500 en dollar canadien, l’indice américain a plutôt chuté de 5%. Le S&P/TSX a connu un meilleur sort (hausse de 3%) puisque le rebond des secteurs pétrolier et minier a ravivé l’indice des actions canadiennes. Les marchés européens ont été plutôt faibles que l’on ajuste ou non pour les fluctuations de devises.
L’avantage des actions à long terme
Après une séquence en dents de scie longue de douze mois où les tentatives de hausses de marchés ont été rabrouées par des reculs aussi importants, les investisseurs doivent se demander si c’est trop risqué d’être exposé à toutes ces montagnes russes financières. Nous remarquons qu’ils sont déchirés entre la sureté des véhicules à revenus fixes qui n’offrent pas de rendement et la volatilité des titres d’équité (ou hybrides à saveur d’équité) qui offrent une perspective de rendements décents.
Lorsqu’on approche le marché des actions avec une base académique, on en déduit que les gains sont générés par trois facteurs :
- Les profits ;
- Le redéploiement judicieux de ceux-ci par ses dirigeants (nouveaux projets, dividendes, rachat d’actions, remboursement de dettes);
- Le prix payé par les investisseurs pour ces profits. Plusieurs mesures existent pour l’analyser, comme par exemple le ratio cours/bénéfices.
Il existe d’autres facteurs qui peuvent aussi justifier l’intérêt de détenir des titres de propriété mais qui sont souvent négligés par les investisseurs. Les actions ont, en effet, la capacité de capter le désir humain de s’améliorer et l’aspiration à l’innovation constante des organisations qui ont du succès. Monsieur Eddy Elfendein dans « Crossing Wall Street » nous explique que l’équité est la seule classe d’actif qui permet de capturer l’ingéniosité humaine, qu’il classifie comme l’actif ultime.
Après la crise financière de 2008, plusieurs individus ont conclu à tort que le marché ressemble à un casino et que les probabilités s’élèvent en bouclier contre eux. Puis, dans la tourmente, les politiciens flairent la méfiance envers Wall Street et son pendant canadien, Bay Street. Ils en profitent pour se bâtir du capital politique de façon à tirer avantage de la crise pour imposer de nouvelles règlementations et augmenter la taxation de ceux caractérisés de « fortunés » par les critiques de l’économie de marché. La réalité est toute autre : les marchés et les économies sont et seront toujours cycliques. Certains passages à vide sont tout simplement plus douloureux que d’autres.
Bien que le progrès ne soit pas toujours apparent à court terme, il fait son chemin en arrière-scène et se manifeste par séquence. Ce n’est que lorsqu’on évalue l’histoire à long terme que le progrès se concrétise et qu’il dévoile ses accomplissements. Warren Buffet en a fait un sujet dans sa lettre annuelle aux investisseurs cette année et nous recommandons à tous les investisseurs à long terme d’y lire les passages sur la productivité et la prospérité.
L’ingéniosité humaine est la raison principale qui pousse les actions ordinaires à surperformer les obligations à long terme.
Comment gérer la psychologie de l’investisseur
Si vous êtes un lecteur de notre lettre trimestrielle, vous devez savoir que, pour avoir du succès, un investisseur ne doit pas se fier uniquement aux disciplines de la finance, de la comptabilité et de l’économie mais il doit aussi accumuler un bagage de connaissances en psychologie.
Les investisseurs moyens sont souvent atteints de bipolarité lorsqu’ils traitent avec les marchés financiers. Ils passent d’un état de cupidité et d’optimisme ultime à un état de panique et d’aversion au risque au gré des nouvelles du jour. Ils ne prennent que rarement la peine de peser le pour et le contre d’une nouvelle, qu’elle soit bonne ou mauvaise, et sautent rapidement à une conclusion approximative, influencée par ce qui flotte dans l’ère du temps.
Comme Howard Mark a dit, « dans le vrai monde, les choses tendent à demeurer entre « relativement bien » et « pourraient aller mieux ». Par contre, en investissement on passe de la perfection au désespoir en un clin d’oeil. »
Dans le but de gérer ces comportements, nous essayons d’en apprendre plus sur ces distorsions cognitives afin de contrôler nos réactions émotionnelles et de penser de façon plus rationnelle. Voici quelques exemples qui nous servent d’étude de cas pour vous illustrer notre processus cognitif :
- En 2008, le prix du baril a chuté de 145 US$ à 31 US$ en moins d’un an. Par après, il est remonté jusqu’à 113 US$ en moins de deux ans et s’est transigé avec une certaine stabilité par la suite. En 2014, tout a basculé et le prix de l’or noir s’est retrouvé jusqu’au niveau de la mi-vingtaine en 2015. Cette chute importante a été le sujet de bien des nouvelles et analyses de la part des médias et de certains participants de marchés. Comme c’est typiquement le cas, c’est l’angle de l’extrême pessimiste qui a été exploité dans les ouvrages sur le sujet. Les experts se sont penchés sur la possibilité que ce soit un frein à l’économie et de l’impact déflationniste. Par contre, peu d’investisseurs se sont penchés sur les impacts à long terme de la faiblesse du prix de l’énergie. Nous ne savons pas si vous êtes d’accord avec nous mais, lorsqu’on pense que les dépenses des consommateurs représentent environ 70% à 80% de la plupart des économies développées, si l’on permet à ces derniers de sauver sur leurs dépenses énergétiques, cela ne peut pas être si mauvais que cela. La conclusion que nous tirons des effets de la baisse des prix du pétrole est que les effets immédiats en bourse sont beaucoup moins importants que les impacts à long terme pour le consommateur qui pourra affecter les sommes économisées ailleurs et ainsi promouvoir la croissance économique.
- La plupart des participants ont été obsédés par les faits et gestes de la Fed quant au calendrier des hausses des taux d’intérêts à venir. Les journaux financiers se sont concentrés à trouver la date qui marquera une hausse des taux comme si cela avait de l’importance sur la valeur des marchés. Ce qui importe vraiment n’est pas de savoir si et quand la Fed haussera son taux directeur mais plutôt à quelle fréquence les hausses auront lieu et jusqu’à quel niveau se négociera le taux directeur de la Fed lorsque la séquence de hausse tirera à sa fin. Par ailleurs, lorsque la Fed se met à élever ses taux, cela témoigne que les perspectives économiques sont meilleures. N’est-ce pas une bonne nouvelle? Enfin, la conséquence des mouvements des taux d’intérêts n’est pas aussi évidente que l’on veut bien nous le laisser entendre.
- Les inquiétudes économiques en Chine ont plombé les marchés tout au long de la deuxième moitié de 2015. Les médias n’ont cessé de nous faire craindre les impacts potentiels sur l’économie mondiale d’un ralentissement économique chinois, tout en prenant bien soin de souligner une crise potentielle d’une ampleur de celle de 2008. Prenons le soin d’analyser les faits : la Chine est une économie importante puisqu’elle représente le quart de la capacité de manufacture du monde. Elle achète plus de 2$ milliards de produits du reste du monde à chaque année. L’économie du reste du monde n’est cependant pas à sous-évaluer. Fort de son PIB de 60$ billions, excluant celui de la Chine, le monde est grand et cela permet d’amortir un choc dans l’économie chinoise. En ce qui concerne les États-Unis, on estime que la Chine représente moins de 1% des profits des entreprises combinés du S&P 500 et moins de 10% des produits exportés des États-Unis se dirigent vers la Chine. Bien que nous croyions qu’une répétition des évènements de 2008 soit improbable, un ralentissement brutal de l’économie chinoise et une dévaluation substantielle de la devise chinoise pourraient avoir un impact de grande envergure affectant même les marchés financiers mondiaux à cause du phénomène de la « contagion psychologique » dont l’économiste Paul Krugman fait référence. L’économiste explique que les marchés sont reliés par la psychologie des investisseurs.
Les bons et mauvais côtés de la volatilité
Notre expérience nous a enseigné que les investisseurs ont une réaction asymétrique par rapport au risque. Lorsque les titres sont à la hausse, la volatilité importe peu et n’est pas un risque. Par ailleurs, lorsque les titres sont à la baisse, la volatilité devient soudainement un risque accablant. Mais la question à 1 million de dollars est la suivante : Est-ce que la volatilité doit vraiment être considérée comme un risque?
Lors des dernières années, nous avons été témoin d’une volatilité supérieure à la moyenne dans la plupart des marchés financiers. Ces fluctuations importantes des marchés sont habituellement signe d’un manque de liquidité. Il y a plusieurs raisons qui nous portent à croire que ces conditions de marchés pourraient perdurer. Les raisons principales sont :
- Moins de mainteneurs de marchés (Market Makers) ;
- Une capacité amoindrie des banques de conserver de l’inventaire de valeurs mobilières. Les nouvelles règlementations font en sorte que les banques ont moins accès à l’effet de levier puisque les exigences en capitaux propres pour opérer ont augmenté significativement;
- Un coût de capital beaucoup plus élevé, encore à cause de la règlementation.
Nous pourrions argumenter qu’une baisse de la liquidité et une hausse de la volatilité ne sont pas nécessairement mauvaises. Bien évidemment, cela augmente le coût de transiger et les spéculateurs qui doivent entrer et sortir du marché à plusieurs reprises voient leur plan d’affaires écorché. Cela est aussi regrettable pour les investisseurs qui ont un besoin de liquider leur portefeuille à un moment peu opportun ou pour ces investisseurs qui veulent liquider leur portefeuille parce qu’ils sont pris de panique. Cependant, cela ouvre la porte aux investisseurs à long terme qui peuvent mettre à profit la volatilité de façon à puiser des bonnes affaires et d’acheter des titres à grand rabais lorsque les opportunités se pointent. L’investissement n’est-il pas d’acheter bas et de vendre haut ?
L’Équipe Claret