L’année des matières premières

À l’image de 2004, 2005 fut l’année des matières premières, mais cette fois-ci, avec plus de vigueur au niveau du prix des actions reflétant ainsi l’impressionnante poussée de la valeur du pétrole, du gaz naturel et des autres ressources énergétiques.

Voici la performance des indices principaux pour le quatrième trimestre et pour l’année 2005.

  4ième trimestre Année 2005
  Monnaie locale Dollars canadiens Monnaie locale Dollars canadiens
S&P/TSX (CAN) + 2.36 % + 2.36 % + 21.91 % + 21.91 %
S&P 500 (U.S.) + 1.59 % + 1.50 % + 3.00 % – 0.42 %
Nasdaq (U.S.) + 2.49 % + 2.40 % + 1.37 % – 1.99 %
Europe (Euro) + 3.52 % + 1.91 % + 20.95 % + 2.23 %
Nikkei (Japon) + 18.69 % + 14.32 % + 40.24 % + 18.17 %

En tout et partout, l’activité économique mondiale a été soit ferme ou en croissance et l’inflation sous contrôle.

La performance de l’or a été une surprise car, si on prend en considération l’absence d’inflation et la force du dollar US vis-à-vis les monnaies européennes et asiatiques, ce renchérissement est particulièrement inhabituel. La lancée du prix de l’once d’or ressemble beaucoup plus aux conséquences de la spéculation et des liquidités excessives que le résultat de craintes liées à l’inflation.

Le dollar canadien a fait flèche de tous bois. L’économie canadienne, riche en ressource naturelle, donne à notre devise un avantage structurel. Tout porte à croire que cette robustesse perdurera pour les mois à venir car notre économie croît à pleine vapeur et la création de nouveaux emplois va de bon train. Le Canada jouit aussi du surplus de la balance commerciale et d’un surplus budgétaire. Même si nous continuons à croire que le dollar canadien atteindra la parité avec le dollar américain, celle-ci ne sera pas atteinte à court terme. La force du dollar canadien a déjà fait beaucoup de ravage à la compétitivité de notre secteur manufacturier et les répercussions d’une continuité trop précipitée de cette tendance pourraient s’avérer très néfastes.


Au cours des derniers mois de 2005, plusieurs économistes et analystes vous ont inondé de prévisions et de commentaires sur ce que 2006 pourrait vous réserver. Nous voulons donc faire suite à ces témoignages en éclaircissant certains sujets qui ont été identifiés comme des risques majeurs pour l’économie et pour le marché boursier.

Inflation

La grande majorité des investisseurs se demandent comment l’inflation peut-elle demeurer si faible alors que les coûts liés à l’énergie et aux ressources sont en forte progression.

Premièrement, lorsqu’on exclut la nourriture et l’énergie du panier de biens, l’inflation de base est très faible et ce panier ne subit pas de pression à la hausse. Ce constat s’applique presque partout, même en Chine. La cause principale est le transfert de la production vers les pays où la main-d’oeuvre est en abondance et, par le fait même, à moindre coût. En d’autres mots, au fur et à mesure que la quantité de gens mondialement cherchant à travailler croît et produit de plus en plus de biens, l’économie mondiale augmente tout en gardant les prix bas.

Deuxièmement, la plupart des activités manufacturières migrent toujours vers les régions moins coûteuses. La Chine écope comme le principal coupable du vol d’emplois mais n’oublions pas l’Europe de l’Est, l’Inde ainsi que plusieurs autres. La résultante globale consiste en une réduction des coûts de production et en un accroissement de la productivité.

Finalement, la hausse de la compétition outre-mer a forcé les entreprises domestiques à répondre avec des mesures drastiques afin de survivre. Les mises à pied et la soustraitance ont peut-être ébranlé la création d’emplois dans les coins du monde où les coûts de production sont élevés mais tout cela fait partie de la destruction créatrice qui ultimement a un effet positif sur l’échelle mondiale. Cependant, au travers tout ce charivari, le taux de chômage américain est à un niveau très faible et le revenu national est à la hausse. Enfin, lorsque deux individus se trouvent chacun un nouvel emploi et qu’un travailleur perd le sien, il ne faut pas sonder le pouls de l’économie en demandant l’avis de celui qui se retrouve au chômage. C’est cependant un comportement qui est trop souvent exploité par les politiciens et les lobbyistes.

Déficit budgétaire et déficit de la balance commerciale américaine

Les dépenses colossales du gouvernement américain et l’appétit pour les biens étrangers des consommateurs ont gonflé les plus importants déficits jumeaux de l’histoire américaine qui demandent à être financés outremer. La problématique identifiée par plusieurs stratèges se situe au niveau de la possibilité d’une liquidation ou d’une diminution significative, de la part de la Chine et du Japon, de leur réserve de dollars américains. Si cela devait arriver, le dollar américain s’écroulerait, les taux d’intérêts monteraient en flèche et l’économie mondiale sombrerait dans une récession profonde. Voici la rhétorique des prophètes de malheurs.

Il est bien évident que ce déséquilibre est inquiétant. La clé de cette énigme est de savoir si et quand un tel événement pouvait avoir lieu. Bien qu’il semble difficile de voir ces déficits perdurer, ils peuvent être soutenus pendant de longues périodes.

Ce n’est cependant pas dans l’intérêt de quiconque de déclencher une récession américaine, et ce, spécialement du côté asiatique. C’est dans cette optique que les banques centrales de cette région demeurent bien préparées à maintenir leur statut d’acheteurs de dollars américains. Ce soutient ne peut cependant pas empêcher le dollar US de perdre de la valeur, comme ce fût le cas en 2002-2004. Néanmoins, tant que les taux d’intérêt demeureront stables, la possibilité d’un recul des marchés restera limitée.

Comment va se conclure toute cette histoire? Théoriquement, elle prendra fin lorsqu’il ne sera plus dans l’intérêt économique ni politique des gouvernements asiatiques de continuer d’accepter le dollar US en échange de leurs biens. Pour l’instant, ce n’est pas une option pour ces pays car ils doivent faire travailler leur énorme main-d’oeuvre afin d’éviter de graves problèmes chez eux. D’un autre côté, un regain de protectionnisme aux États-Unis pourrait aussi agir à titre de catalyseur et provoquer une crise. De ce fait, il devient capital de surveiller le taux de chômage. Si les Américains commencent à perdre plus de jobs qu’ils en créent, le protectionnisme pourrait faire son chemin jusqu’aux agendas des politiciens. Néanmoins, une réévaluation lente mais constante de la devise chinoise devrait corriger la situation.

La dette des consommateurs et leur désépargne

Depuis plusieurs années déjà, la situation financière du consommateur américain inquiète beaucoup. Quoi qu’il en soit, d’avoir parié contre le consommateur américain dans les dernières années s’est avéré une aventure cauchemardesque pour l’investisseur car ces derniers sont en bien meilleure santé financière qu’ils en paraissent à première vue. Les médias financiers font allègrement le procès des consommateurs américains en s’attardant seulement à un côté de la médaille alors que d’enquêter les deux côtés de leur bilan se veut une démarche beaucoup plus équitable. En somme, voici la liste des faits qui caractérise le consommateur américain. En dépit d’un ratio extrêmement élevé de la dette des ménages par rapport à leur revenus (121%), le capital des propriétaires, que le commun des mortels réfère à la partie payée de la maison, se situe aussi à un sommet historique (120%). D’ailleurs, la valeur nette des américains s’évalue à 550% du revenu. On estime que cette valeur n’a été surpassée qu’au sommet de la bulle technologique (en 2000, le ratio était de 600%). Bien sûr certains consommateurs américains font face à d’importants défis, mais dans son ensemble, les consommateurs ne sont pas aux abords d’un gouffre financier à moins d’une baisse importante de leurs actifs.

La chute significative du taux d’épargne, qu’on peut maintenant qualifier de désépargne, suscite aussi une certaine crainte car il se chiffre à un bas historique. Il y a cependant une raison qui incite l’Américain moyen à moins épargner. Sa richesse a augmenté constamment au cours des 25 dernières années (il y a eu de courtes périodes de réajustement). Dans l’avènement d’une stagnation de leur actif, ils corrigeront probablement le tir en réinjectant des sommes dans leur patrimoine via l’épargne et nous reverrons le taux d’épargne remonter à des niveaux normaux. Finalement, en autant que le revenu réel continue sa progression, et que la situation de l’emploi poursuit sa croissance (comme c’est le cas présentement) il ne devrait pas y avoir de recul dans les dépenses des consommateurs comme le stipulent certains stratèges et analystes.

La bulle immobilière

Une révision des faits historiques nous démontre clairement qu’aux États Unis, le prix moyen national des maisons n’a jamais connu une baisse annuelle en terme nominal depuis la grande dépression. Il y a déjà eu des chutes importantes dans certaines régions spécifiques mais jamais au niveau de l’agrégat national. Un tout autre résultat pourrait être plausible si les taux hypothécaires devaient connaître une forte flambée à la hausse. Ce scénario est néanmoins difficilement envisageable cette année étant donné que l’inflation demeure contenue.


Du côté du marcher boursier, nous désirons réitérer que nous croyons sincèrement qu’il est impossible de constamment augurer des prévisions fiables du marché. Cela n’empêche pas certains braves d’essayer. Il nous arrive même de tenter l’expérience, à temps perdu bien sûr, sachant trop bien que ce futile exercice est perdu d’avance.

Ceci étant dit, laissez-nous commenter un éventail d’indicateurs qui ont été fréquemment cités par l’industrie financière comme de bons outils pour entrevoir ce qui peut se passer en 2006.

  • Nous sommes dans la deuxième année du cycle présidentiel et ce cycle a une durée de 4 ans. Le rendement annuel moyen depuis 1888 de cette 2e année est de 3.3%. Le haut de la fourchette s’établit à 45% sous la présidence de Eisenhower et à la pire année boursière fut de -29% sous Nixon.
  • Le rendement annuel du S&P 500 en 2004 se chiffrait à 9%

    Le rendement annuel du S&P 500 en 2005 se chiffrait à 3%

    Si on poursuit la lancée entamée, on pourrait s’attendre à un rendement sous les 10% mais l’histoire nous démontre le contraire. On n’a jamais enregistré 3 années consécutives de gains positifs inférieurs à 10%.

  • En milieu de cycle présidentiel on semble relativement demeurer en territoire neutre. Les années types ont cependant un premier semestre faible, une baisse en octobre et un rallye de fin d’année.
  • Si on prend en considération les hausses de taux de la Fed, les statistiques démontrent des performances plutôt faibles pour les 10 mois suivant la dernière hausse.
  • Pendant que la banque centrale américaine hausse les taux d’intérêts à court terme, il importe de surveiller l’écart entre ceux-ci et les taux à long terme. Le marché boursier n’aime pas voir les taux à court terme surpasser ceux à long terme. Autrement dit, quand la courbe de taux d’intérêt devient inversée, c’est de mauvais augure pour l’économie.

Lors de la lecture de cette section, il faut se rappeler que bien qu’il soit facile de faire parler les chiffres, il est tout aussi possible de les voir mentir.

L’équipe Claret

Auteur(e)

  • Claret
    Fondée en 1996, Claret se spécialise dans la gestion de portefeuille de placements afin de répondre aux besoins grandissants d’une clientèle d’investisseurs privés à valeur nette élevée.

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