Comment choisir des actions: les meilleures pratiques pour la recherche d’entreprises dans lesquelles investir

Lorsque l’on achète une action sur le marché boursier, on achète un morceau, aussi petit soit-il, d’une vraie compagnie. La valeur d’une action reflète la capacité de l’entreprise rattachée à générer des profits dans le futur. Il est donc capital de pouvoir bien identifier les bonnes compagnies si l’on veut avoir une stratégie d’investissement performante.

Bien entendu, cela est plus facile à dire qu’à faire. Nous expliquons ici comment les actions des compagnies sont qualifiées et notées, et nous partageons quelques conseils pour déterminer la réussite future d’une compagnie et certaines erreurs à éviter.

Comment les actions d’une compagnie sont-elles qualifiées?

Dans sa plus simple expression, il est utile de penser à une entreprise comme étant une machine à fabriquer de l’argent, un peu comme une machine à saucisses. Lorsque les ingrédients (ou intrants) sont passés à travers la machine, le résultat est, on l’espère, une saucisse appétissante, de qualité supérieure. Pour les entreprises, qu’elles soient privées ou cotées en bourse, elles sont approvisionnées en argent par le biais d’investissements en actions ou de dettes. Cette entreprise utilise ensuite ses ressources pour transformer cet argent en un flux monétaire. 

Comment savoir si vous avez choisi une bonne compagnie? Simplement mesurer la quantité d’argent qui sort de la machine par rapport à la quantité d’argent qui y entre, et avec un peu de chance, vous obtiendrez un ratio satisfaisant. 

Pour mieux comprendre comment qualifier les compagnies, il faut arriver à conceptualiser les trois parties suivantes. Il y a les intrants, soit les ressources monétaires qu’ingère la machine, les extrants, soit les ressources monétaires que génère la machine et finalement, la machine elle-même. 

Les intrants: comment déterminer le coût de capital?

Les compagnies ont besoin de financement pour lancer leur plan d’affaires. On appelle les dépenses en capital les dépenses encourues pour les biens et immobilisations durables de l’entreprise comme les terrains, les usines, la machinerie, etc. Les entreprises ont également besoin de fonds pour financer leurs opérations courantes. On appelle le fonds de roulement les sommes qui sont mis à la disposition de l’entreprise pour remplir l’inventaire, payer les dépenses courantes et les employés jusqu’à temps que les clients remboursent leurs dus, qui peut se faire plusieurs jours ou semaines après livraison des biens et services de l’entreprise. L’ensemble des fonds nécessaires au fonds de roulement et aux dépenses en capital de l’entreprise s’appelle le capital total de la firme. 

Tout ce capital ne tombe pas du ciel et puisque les compagnies n’opèrent pas dans un monde isolé, elles sont en compétition constante avec d’autres compagnies, qui essaient aussi de faire le plus d’argent possible.

Les investisseurs vont investir leur argent dans les compagnies qu’ils croient être celles qui vont leur être le plus profitable compte tenu du risque qu’ils encourent. Le point de bascule qui fait que les investisseurs sont prêts à investir leur propre capital se nomme le coût de capital.

À long terme, le coût de capital est influencé par des règles de marchés qui sont efficaces et qui prennent en considération le risque. Les facteurs qui quantifient le coût du capital incluent les risques encourus, ainsi que le rendement généralement attendu dans un investissement similaire. 

Le coût du capital est donc défini par ce que les investisseurs exigent en retour d’y investir des sous. Arriver à faire assez de profit pour compenser le montant nécessaire pour payer le coût du capital est donc la note de passage pour une entreprise. En revanche, les bonnes entreprises ne se contentent pas, seulement, d’une simple note de passage, elles se doivent d’atteindre un A plus! 

Le capital permanent et temporaire: trouver la bonne formule

Le capital qui sert de financement nécessaire à une entreprise est composé de capital permanent et de capital temporaire. 

Les actions ordinaires sont considérées comme du capital permanent. Ce type de financement coûte plus cher à l’entreprise puisque l’investisseur doit confier ses économies pour une période indéterminée et le rendement n’est jamais connu d’avance. Il y a également une multitude de risques que le rendement réalisé soit différent du rendement espéré. 

Les obligations, débentures et autres prêts sont connus comme capital temporaire. Ce type de financement est moins onéreux pour l’entreprise car leur échéances et le paiement des intérêts sont établis à l’avance et ils sont prioritaires en cas de faillite. Les bonnes entreprises savent trouver le bon mélange de capital permanent et temporaire et chaque industrie a ses normes d’excellence. On appelle le coût moyen pondéré du capital le coût de financement de la firme compte tenu de ses différentes sources de financement temporaire et permanent. 

Une des premières étapes dans l’évaluation d’une entreprise est d’étudier le bilan d’une compagnie et de comparer l’endettement relativement à son industrie. Pour arriver à dénicher une excellente entreprise, il faut arriver à en trouver une qui a la capacité de générer de bons profits sans avoir trop recours à des emprunts bancaires ou autres. De cette façon, une plus grande portion des flux de trésorerie est attribuée aux porteurs de parts. Voilà donc ce à quoi on fait référence quand on dit qu’une entreprise a un bon bilan. 

Les extrants: déterminer le BAIIA, les bénéfices et les flux de trésorerie

Une entreprise prospère gagne évidemment de l’argent. Mais comment mesurer avec précision les bénéfices réels d’une entreprise? 

Le BAIIA, le profit et les flux de trésoreries sont tous utilisés pour définir l’argent généré par la machine. Ces mesures ont chacun leurs forces et leurs faiblesses et il est important de pouvoir les comprendre ainsi que leurs interactions pour bien évaluer une entreprise.

Le très utilisé BAIIA (ou EBITDA en anglais) représente le Bénéfice avant Impôt, Intérêt et Amortissement. Le BAIIA ainsi que le profit d’opération et la marge brute sont des outils pour mesurer la profitabilité des opérations d’une entreprise. 

Puisqu’il n’est pas logique d’appliquer les impacts financiers de l’achat d’une usine sur une seule année alors qu’elle peut durer plusieurs décennies, on utilise l’amortissement pour diluer l’impact d’un tel achat sur plusieurs années. L’amortissement est une méthode pour quantifier et distribuer l’impact des grosses sorties de fonds comme l’achat d’une usine sur plusieurs années, soit tout au long de leur durée de vie utile probable. Cette méthode repose sur des hypothèses établies par les gestionnaires de l’entreprise et il y a possibilité de l’utiliser pour maquiller les résultats réels de l’entreprise.

Le BAIIA a l’avantage d’éliminer certaines des manipulations comptables potentielles qui peuvent surestimer les résultats. Cependant, les intérêts, les impôts et les amortissements font partie des dépenses des entreprises alors il faut en tenir compte pour avoir une image véridique de leurs profits. Le BAIIA est souvent utilisé pour évaluer une entreprise puisqu’en éliminant ces trois catégories de dépenses, on montre une meilleure image des résultats.

Le profit est le résultat net d’une entreprise après avoir retranché toutes les dépenses telle que mesuré par les méthodes comptables reconnues. Cette mesure est supposée représenter la profitabilité réelle d’une entreprise. En revanche, les méthodologies comptables pour déterminer la profitabilité reposent sur une multitude d’hypothèses et de techniques et elles peuvent être maquillées pour déformer temporairement la réalité financière d’une entreprise. Le profit a l’avantage de tenir compte de toutes les catégories de dépenses de l’entreprise mais ses hypothèses peuvent être manipulées et/ou elles peuvent déformer la réalité économique d’une entreprise. 

Le flux de trésorerie, c’est l’argent qui entre dans le compte bancaire de la compagnie. En y retranchant les dépenses en capital de soutien des immobilisations et des autres actifs, on obtient les flux de trésoreries autogénérés. Le flux de trésoreries autogénérés est un excellent outil pour évaluer les entreprises, mais il ne tient pas compte de l’achat des actifs à long terme qui ont été exécutés dans le passé. 

Apprendre à utiliser les différentes métriques demande des connaissances approfondies de la finance, mais voici ce que notre expérience nous a enseigné : 

  • Les bonnes entreprises tendent à s’améliorer. Leurs ratios de profitabilités présentent des tendances haussières;
  • Les différents ratios de profitabilités sont tous importants et il faut porter attention aux différents aspects de la profitabilité;
  • Il faut faire attention aux entreprises qui utilisent de l’ingénierie financière pour masquer une performance boiteuse des opérations;
  • On doit pouvoir identifier les divergences entre les mesures d’opération et les mesures totales. Par exemple, lorsqu’une entreprise montre un BAIIA en forte croissance, mais un flux de trésorerie autogénéré qui se contracte, cela peut démontrer qu’il y a anguille sous roche. 

L’entreprise: les facteurs à prendre en compte dans la recherche d’actions

L’entreprise est tout simplement un assemblage de différentes ressources utilisées dans le but de créer de la valeur. Les bonnes entreprises ont généralement un avantage comparatif par rapport aux autres entreprises. Certaines misent sur des marques de commerce (Coca-Cola, Nike, Lululemon), d’autres profitent de barrières à l’entrée importantes (CN, CP, Suncor) d’autres profitent d’avantages règlementaires (les Banques Canadiennes) et certaines peuvent jouir de brevets commerciaux (Qualcomm, Pfizer, Abbvie) ou d’avancées technologiques. 

La recette des bonnes entreprises est souvent simple. D’ailleurs, une étude quantitative par la firme Nomura a prouvé que plus le langage du PDG d’une entreprise est simple, plus l’entreprise va produire de bons rendements. D’ailleurs, Warren Buffet, un des investisseurs les plus reconnus de l’histoire a comme règle de base d’investir dans des entreprises dont le plan d’affaires est simple et qu’il peut facilement le comprendre. Peter Lynch, également reconnu comme as investisseur a conseillé aux investisseurs de ne jamais investir dans des idées qui ne pouvaient pas être illustrées avec un crayon. 

Les ingrédients doivent être en mesure de provoquer une réaction à la chaîne. Par réaction à la chaîne, on veut dire que les bons profits générés par les ressources humaines, matérielles, technologiques et monétaires de la firme peuvent être réinvestis, dans le but de générer des profits encore plus importants qui pourront créer un cycle grandissant de profits. Voilà, comment l’on sait que l’on a une bonne prise!

 Les bonnes entreprises doivent être en mesure de générer un ratio de profitabilité qui est plus grand que leur coût de capital. Spécifiquement, l’argent qui sort de la machine est mesuré en utilisant des ratios comme le ratio de rendement des capitaux propres, le rendement des actifs totaux et le rendement des flux de trésoreries disponibles. 

Plus le rendement de l’entreprise est élevé par rapport à son coût de capital, plus l’entreprise va pouvoir réinvestir dans son plan d’affaires et ainsi créer une réaction en chaîne qui se veut exponentielle. Voilà la clé pour dénicher les perles rares en investissement. Cette croissance parabolique permet d’atténuer les multiples erreurs qui sont inévitables dans l’analyse financière puisque l’on travaille avec des données incomplètes et des hypothèses pour estimer les informations du futur. 

Erreurs à éviter

Il faut éviter d’investir dans des entreprises qui affichent une profitabilité qui est égale ou inférieure à son coût de capital. On décrit souvent ces entreprises de zombie corporatif. Les taux d’intérêt anormalement faibles ont contribué à leur prolifération puisque le financement subventionné par les politiques monétaires et gouvernementales en cours les garde sur le respirateur artificiel et empêche leur décès. 

Courir après les entreprises qui génèrent un très haut dividende peut être une arme à double tranchant. Attention aux entreprises qui ne réinvestissent pas dans leur plan d’affaires. Les entreprises qui génèrent un très haut dividende peuvent sembler alléchantes, mais peuvent également être coupables de ne pas réinvestir dans elles-mêmes. Elles sont donc plus à risque de se retrouver avec des installations ou des équipements vétustes et de perdre face à des compétiteurs mieux outillés et de tomber dans une spirale de décroissance.

Attentions aux nouveautés. À court terme, le coût de capital peut être influencé par des croyances et des théories non fondées. Par exemple, lors de la déréglementation du cannabis, les investisseurs ont faussement cru qu’à l’instar du commerce illicite les entreprises de l’industrie de cette drogue arriveraient éventuellement à imprimer de l’argent. Également, lors de la naissance de nouvelles industries, les investisseurs sont souvent éblouis par l’effet de la nouveauté et de l’anticipation de profits éventuels et ils sont prêts à garrocher leur argent sans compter à la seule vue de quelques maquettes ou de projets un peu flous. Bien que cette dislocation du coup de capital à court terme permette la création de nouvelles entreprises comme Tesla ou Netflix, elle est plus souvent qu’autrement proie aux règles de la compétitivité à long terme. En effet, les nouvelles industries et nouvelles découvertes demandent un exercice de jonglerie extrême entre le capital nécessaire pour financer la croissance de la machine et la quantité d’argent qui en ressort. Bien souvent, l’investisseur voit sa portion du gâteau diluée par l’ajout de nouveaux actionnaires lors de nouvelles émissions d’actions pour financer la croissance.

Un point important lorsque l’on trouve une bonne entreprise est de s’assurer de l’acheter à un bon prix puisque payer trop cher peut hypothéquer le rendement des meilleures entreprises.

Par ailleurs, même après avoir trouvé une bonne entreprise et avoir été assez astucieux pour l’acheter à bon marché, le jeu n’est pas encore gagné! Il faut maintenant être patient. Même les machines les mieux huilées prennent des années à créer de la richesse. Warren Buffet nous a bien avertis: « Si vous n’êtes pas prêt à détenir un titre pour les 10 prochaines années, vous ne devriez pas le détenir pour les 10 prochaines minutes. »

Comme vous l’avez vu, trouver de bonnes entreprises n’est pas une tâche facile. Il faut avoir de bons outils et, idéalement, plusieurs années d’expérience pour esquiver les pièges que nous tendent les marchés financiers et ainsi profiter de la plus-value d’un bon investissement.

Auteur(e)

  • Vincent Fournier, M.Sc., CFA
    Vincent a commencé sa carrière en 1999 et est détenteur de la charte CFA depuis 2004. Il détient un baccalauréat en administration des affaires et une maîtrise en économie. Il est membre du conseil d’administration de l’association CFA Montréal depuis 2005 et y a occupé le poste de président en 2010-11. Vincent s’est joint à l’équipe Claret en 2002.

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