Taux d’intérêt, fonds communs et effet de levier

Les marchés boursiers ont poursuivi sur leur lancée, lors du premier trimestre de l’année 2021, en affichant une performance positive de l’ordre de 5 %. Pour leur part, les marchés obligataires ont essuyé une perte de 3 % lors des trois derniers mois alors que les taux d’intérêt se sont mis à remonter un peu partout dans le monde, mais surtout en Amérique du Nord.

Bien que la vigueur ait persisté tout au long du trimestre sur les marchés boursiers, les facteurs qui ont contribué à sa performance ont changé. Les secteurs ayant profité de l’urgence sanitaire liée à la COVID-19 ont cédé la place aux secteurs plus traditionnels qui bénéficieront du retour à la normale, ce que l’on nomme communément la « réouverture » de l’économie.

Puisque les marchés boursiers sont des outils qui anticipent les événements économiques, leur performance semble nous indiquer que nous connaîtrons une reprise économique saine. Si l’on mise sur la promesse des banques centrales de maintenir leurs politiques monétaires expansionnistes (c’est-à-dire qu’elles continueront à faire tourner la planche à billets et garderont les taux d’intérêt bas) pendant encore plusieurs années, et sur l’engagement des gouvernements de presque partout dans le monde de dépenser des sommes considérables pour assurer un soutien financier et des mesures de relance, nous pourrions profiter d’une reprise économique qui s’adonnerait à perdurer très  longtemps.

La hausse époustouflante du S&P 500 entre le creux induit par la COVID-19 en mars 2020 et son niveau actuel, montre une progression de l’indice de près de 77 %, excluant les dividendes. Il n’est donc pas étonnant que tant d’investisseurs se demandent ce qui peut freiner cette ascension et quel niveau elle peut atteindre. En fait, une grande partie de cette inquiétude est liée aux valorisations des entreprises et à plusieurs qui se posent la question : sommes-nous en présence d’une bulle?

Certes, les prix actuels des actifs ne sont en aucun cas considérés comme bon marché. Nous oserions même dire qu’ils se situent probablement dans le haut de la fourchette de ce que nous considérons comme normal, sans toutefois avoir franchi la limite du raisonnable. 

Permettez-nous d’expliquer :

  • Habituellement, le prix des actifs reflète le contexte des taux d’intérêt. Selon le consensus prévisionnel des analystes sur les bénéfices de 2021, le ratio cours-bénéfice du S&P 500 est d’environ 22, ce qui correspond à un rendement sur bénéfices (c’est-à-dire l’inverse du ratio cours/bénéfices, soit les bénéfices divisés par le cours) de 4,5 %. En revanche, l’obligation de 10 ans du gouvernement américain ne rapporte que 1,7 %. Dit autrement, l’indice S&P 500 paie les investisseurs près de 3 % de plus pour qu’ils prennent le risque de détenir les titres des 500 plus grandes sociétés américaines au lieu d’une obligation à taux fixe sans risque et, historiquement parlant, cette prime de risque est conforme à la moyenne des 20 dernières années.
  • La valorisation peut également être analysée par rapport aux taux d’intérêt à court terme : beaucoup de gens ont tendance à comparer l’évolution actuelle du marché avec la bulle Internet de l’an 2000. Pour mettre les choses en perspective, le ratio cours/bénéfice du S&P 500 était alors de 24, ce qui correspondait à un rendement des bénéfices de 4,2 %. Toutefois, le taux d’intérêt en vigueur à l’époque était de 6,5 %. Le marché d’aujourd’hui présente un rendement des bénéfices de 4,5 %, mais les taux d’intérêt se chiffrent seulement autour de 0%. Autrement dit, le S&P 500 est beaucoup moins cher aujourd’hui qu’il y a 21 ans sur la base des taux à court terme.

Pour ce qui est du marché des actions, le risque le plus important de tous est la possibilité d’un retour en force de l’inflation, ce qui entrainerait une hausse des taux d’intérêt. Les taux ayant baissé pendant 40 ans, ils ont offert un formidable vent de dos pour les investisseurs, faisant grimper le prix des actifs. Maintenant qu’ils sont tombés à 0 %, ils ne vont probablement plus continuer à baisser (à moins, bien sûr, qu’ils ne deviennent négatifs, comme en Allemagne, ce qui est peu probable comme la Fed a assuré qu’elle n’entraînerait pas les taux en territoire négatif). Mais ils pourraient bien recommencer à remonter à partir de maintenant. Bien que la Fed puisse exercer un certain contrôle sur les taux d’intérêt à court terme, sa capacité à contrôler les échéances plus longues est limitée. Une hausse de l’inflation pourrait faire des ravages et provoquer la hausse des taux.

La théorie économique suggère que faire tourner la planche à billets – imprimer de l’argent – ouvre la voie à l’inflation, et faire tourner la planche à billets est exactement ce que toutes les économies développées ont fait. Pourtant, l’inflation brille par son absence. Le Japon imprime de l’argent depuis le début des années 1990 et il essaie toujours d’atteindre, sans succès d’ailleurs, un taux d’inflation de 2 %. L’Europe a aussi copieusement imprimé de l’argent sans créer d’inflation significative. L’inflation est-elle une menace pour bientôt? Qui sait?

Un autre risque imperceptible est celui de l’effet de levier. Nous avons assisté à des fluctuations extrêmes du cours de certaines actions, fluctuations qui n’ont rien à voir avec les fondamentaux. Prenez par exemple GameStop, un revendeur de jeux vidéo. Son titre est passé d’un creux de 5 $ à un sommet de plus de 450 $ en l’espace d’à peine quelques semaines, pour redescendre sous la barre de 50 $ en quelques jours seulement. Tous ces mouvements fous sont le résultat d’une combinaison de forte spéculation parmi les spéculateurs sur séance (pensez courtier à escompte en ligne comme Robinhood) et les fonds d’investissement spéculatifs, soutenus par des institutions financières trop facilement disposées à prêter de vastes sommes d’argent pour faciliter la négociation, question de toucher des commissions. L’Histoire nous apprend que quelqu’un finit toujours par perdre beaucoup d’argent à cause de telles activités irresponsables et, malheureusement, cela finit par exercer une pression considérable sur le système financier (pensez à la crise de 1929, à la débâcle de Long-Term Capital Management en 1998, à la crise financière de 2008-2009…).

En conclusion, nous pouvons alléguer que, bien que les marchés d’actions ne foisonnent pas d’aubaines, leur valorisation n’est pas, selon nous, déraisonnable dans un contexte de taux d’intérêt bas. Puisque le plus grand risque est une hausse potentielle de l’inflation qui entraînerait une hausse des taux d’intérêt, et comme le dit assez souvent Howard Marks, « s’il nous est impossible de prédire, nous devons néanmoins préparer et structurer les portefeuilles en conséquence, c’est-à-dire » :

  • Éviter les obligations à long terme (10 ans ou plus);
  • Favoriser les entreprises qui ont le pouvoir de transmettre les hausses de prix;
  • Favoriser les entreprises dont la structure de coûts est souple;
  • Et surtout, investir dans des entreprises rentables et à long terme.

Je sais que vous êtes nombreux à penser que nous sommes en désaccord avec la structure des fonds communs de placement. En fait, nous ne sommes en désaccord qu’avec les coûts et les prix pour le client, et avec la nature restrictive de certains fonds.

Chez Claret, nos fonds sont structurés uniquement dans le but de profiter à nos clients :

  • D’abord, ils offrent une meilleure diversification dans le cas de portefeuilles de plus petite taille;
  • Ensuite, ils permettent d’accéder à une diversification beaucoup plus large au sein d’une catégorie d’actifs, ce qui permet de profiter des inefficacités les plus prononcées du marché : le Fonds de revenu Claret correspond à ce type de stratégie;
  • Ils aident également les clients à éviter de se concentrer constamment sur des placements individuels dans le portefeuille;
  • Ils aident surtout les clients et les gestionnaires de portefeuille à se concentrer sur les besoins et les objectifs plutôt que sur l’actualité et la volatilité;
  • Enfin, il n’y a pas de frais de gestion supplémentaires, ni de frais d’administration, ni de frais d’audit. Claret assume tous ces frais parce que vous nous payez pour vous offrir la meilleure structure de placement.

J’aimerais profiter de cette occasion pour vous parler un peu plus en détail de notre Fonds de revenu et des raisons pour lesquelles il est conçu pour être conforme aux exigences de la portion des titres à revenu fixe du portefeuille de tout investisseur.

Notre philosophie pour ce qui est des portefeuilles à revenu fixe a toujours été la suivante : qu’il est très facile d’obtenir de bonnes performances lorsque les taux d’intérêt évoluent à la baisse. Au cours des 40 dernières années, c’est ce qui s’est produit. Or, ce qu’on ne dit pas aux investisseurs, c’est que la plupart des bonnes performances proviennent de la hausse du prix d’une obligation à longue échéance lorsque les taux baissent. Mais cette hausse s’érode aussi, progressivement, à mesure que l’obligation se rapproche de son échéance : le prix d’une obligation est d’abord établi à 100 $, puis monte ou descend en fonction des taux d’intérêt, mais finit toujours par revenir à 100 $ à son échéance. En d’autres termes, le prix de l’obligation pourrait atteindre 160 $, puis redescendre lentement à 100 $, indépendamment des taux d’intérêt.

Comme vous pouvez le deviner, pour profiter de cette forte hausse du prix de l’obligation, vous devez la vendre et acheter autre chose. C’était peut-être facile à faire lors des 40 années au cours desquelles les taux ont baissé de 18 % à 2 %. Cependant, ce n’est plus le cas lorsque les taux sont cantonnés à de bas niveaux ou commencent à augmenter.

Voilà ce qui explique pourquoi les fonds de titres à revenu fixe ont enregistré de si mauvaises performances au premier trimestre de 2021 – l’indice obligataire de référence affiche un rendement négatif de 4 %. De plus, le rendement des cinq dernières années n’a guère été meilleur, atteignant à peine 1,6 % par an. Que cela ne tienne, si les taux d’intérêt devaient commencer à augmenter, ce serait bien pire.

Nous avons une tout autre démarche en ce qui concerne les titres à revenu fixe. Nous utilisons des débentures et des actions privilégiées de sociétés pour créer un portefeuille ayant les caractéristiques suivantes :

  • Nous privilégions les plus petits émetteurs, puisqu’il y a moins d’acheteurs potentiels et donc moins de concurrence stimulant la surenchère et pouvant entraîner un rendement à l’échéance plus faible;
  • Nous accordons la plus grande attention au rendement à l’échéance, car nous n’avons pas l’intention de vendre nos débentures ou obligations; la plupart d’entre elles ont un rendement de 5 % ou plus;
  • Nous évitons les échéances plus longues : comme nous investissons dans des entreprises et qu’à long terme l’économie nous surprend toujours avec des événements imprévisibles, nous sommes plus à l’aise de prêter notre argent pour des échéances plus courtes que longues, généralement cinq ans ou moins;
  • Nous privilégions aussi les émissions qui comportent une participation au capital, généralement un privilège de conversion en actions ordinaires ou un droit supplémentaire d’acheter des actions ordinaires. Ainsi, lorsque le cours des actions augmente, nous récoltons un rendement supplémentaire en plus des coupons des débentures;
  • Nous intégrons également les actions privilégiées à notre stratégie non seulement parce que les dividendes ont tendance à être plus élevés que le taux d’intérêt en vigueur, mais aussi parce qu’elles possèdent des caractéristiques que n’offrent pas les obligations à revenu fixe ordinaires : un taux variable ou un dividende fixe combiné à taux révisable qui nous permet de choisir nos taux. 

Bien entendu, il nous est tout à fait possible d’élaborer un portefeuille ségrégué en utilisant la même stratégie que celle décrite ci-dessus. Le concept de fonds communs présente toutefois des avantages non négligeables :

  • Pour que cette stratégie fonctionne bien, il faut une diversification « extrême », c’est-à-dire que le portefeuille doit détenir un très grand nombre de débentures différentes, provenant de différents émetteurs, de différents secteurs et de différentes structures. Bref, plus il y en a, mieux c’est. Elle n’est donc pas envisageable pour des comptes de plus petite taille : par exemple, 200 positions à 1 000 $ chacune constitueraient un portefeuille de 200 000 $ en titres à revenu fixe. Si l’objectif d’un client est de détenir 80 % de son portefeuille en actions et 20 % en titres à revenu fixe, il lui faudrait au minimum un portefeuille de 1 000 000 $. De plus, il serait impossible d’acheter 200 positions à 1 000 $ chacune auprès d’un courtier, car ce qu’il en coûterait pour traiter ces opérations dépasse de loin tout montant raisonnable de commissions qu’un courtier peut réaliser. Cependant, dans un fonds, comme nous achetons en quantités plus importantes, les courtiers sont heureux d’obtenir des produits pour nous;
  • Il est beaucoup plus facile pour un client d’ajouter de nouvelles sommes dans son portefeuille sans avoir à le rééquilibrer pour qu’il continue à répondre à ses objectifs. C’est aussi beaucoup plus facile lorsque le client a besoin de retirer de l’argent. Vendre et acheter nos fonds est un jeu d’enfant;
  • Nos fonds font l’objet d’un audit annuel et les feuillets fiscaux sont produits à temps, épargnant à votre comptable une quantité de travail considérable.

Si vous ne détenez pas encore le Fonds de revenu dans le compartiment des titres à revenu fixe de votre portefeuille, ce serait peut-être une bonne idée d’en parler avec votre gestionnaire de portefeuille.

Sincèrement,

Alain D. Chung, président du conseil et chef des investissements pour l’équipe Claret

Auteur(e)

  • Alain D. Chung, CFA
    Alain a commencé sa carrière en 1983 et est détenteur du titre de CFA. Il a obtenu son baccalauréat en administration des affaires du HEC Montréal pour lequel il s’est mérité une bourse d’excellence en finance. Alain est co-fondateur de Claret et président du conseil et chef des placements. Avant de se joindre à Claret, Alain a travaillé pendant 16 ans comme courtier en valeurs mobilières et vice-président auprès de CIBC Wood Gundy. Alain parle anglais, français, vietnamien, cantonnais et mandarin.

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